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30/06/2024
Les métiers du soin apportent un sentiment d’efficacité et la satisfaction de venir en aide à autrui.
Apporter de l’aide à autrui implique de réguler temporairement et consciemment sa propre subjectivité pour se mettre à la place de l’autre, sans perdre son identité. Cette compétence passe par un partage affectif. Elle engendre une résonnance motrice passant par le système des neurones miroirs, et implique l’état du corps, les réactions viscérales, puis les émotions. Elle permet au professionnel de se représenter le vécu de son patient.
L’enjeu est de se mettre à la place de l’autre sans perdre son identité, acquis au sein d’une relation d’attachement suffisamment sécure. Cependant des phénomènes de contamination peuvent interférer et empêcher la bonne distance, qui a un rôle protecteur.
La santé du professionnel du soin peut se trouver alors altérée, d’autant plus que la répétition de stress chronique augmente. S’en suit une fatigue compassionnelle, qui n’est pas liée uniquement à l’activité professionnelle, mais indique plutôt à un débordement du professionnel et à un épuisement face à la souffrance d’autrui. Cette fatigue n’est pas toujours liée avec une histoire traumatique de la personne aidée. Ce phénomène peut prendre différents aspects symptomatologiques et est à différencier du burnout, du traumatisme vicariant ou de la dépression. C’est un “processus continu, long et silencieux d’érosion psychologique qui résulte d’une exposition prolongée à des agents stressants parfois mineurs qui n’émettent aucun signal d’alarme” (Grebot, 2009).
Lorsque cette fatigue compassionnelle prend une ampleur plus importante, on arrive au burn-out avec un syndrome d’épuisement professionnel, de la dépersonnalisation et une réduction de l’accomplissement personnel. On peut parler d’un processus de désillusion où le professionnel passe de l’enthousiasme à la stagnation, à la frustration et à l’apathie. L’idéalisme déçu du professionnel de santé engagé dans son métier amène une désillusion résultant d’un décalage entre la réalité professionnelle et les caractéristiques de la personne.
Chez les professionnels accompagnants les personnes ayant subies des traumatismes se manifeste une autre forme de fatigue, dû au traumatisme vicariant. Il a été relevé que l’empathie semble être fondamentale dans le mécanisme pouvant amener un traumatisme vicariant (Bouvier et Dellucci, 2017). Un traumatisme vicariant peut donc se manifester entre autres par des symptômes intrusifs tels que des flashbacks, des cauchemars et des pensées obsessionnelles, des comportements d’évitement, des sentiments de détresse, une altération du fonctionnement global.
Pour pallier l’épuisement professionnel, des mesures de préventions primaires existent touchant à divers domaines de la santé (gérer son corps et ses affects, gérer sa pensée (philosophie de vie, doute), gérer sa vie privée et sa vie professionnelle), (Delbrouck, 2021).
Dans l’outillage du professionnel, un espace de supervision, ou d’intervision permet d’avoir un lieu bienveillant et neutre lui offrant la possibilité de se remettre en question en toute sécurité et d’avancer dans le confort d’être accompagné et conseillé (Delbrouck, 2021). Prendre également soin de son corps (au niveau médical, activité physique) et de ses émotions contribue à trouver un équilibre entre temps de soin, de ressourcement, de relations affectives, familiales et amicales. L’équilibre est à trouver aussi au niveau professionnel (horaires, missions, relations avec les collègues, temps de récupération, formation).
La notion d’interrelation apparaît alors primordiale. Le lien et donc le soin apporté au patient dépend du professionnalisme du soignant et aussi de ses capacités et ressources à prendre soins de sa santé dans un réseau d’accompagnement et de lien dans les différents aspects de sa vie.
Bouvier, G. & Dellucci, H. (2017). Chapitre 25. Les traumatismes vicariants. Dans : , C. Tarquinio, M. Brennsthul, H. Dellucci, M. Iracane-Coste, J. Rydberg, M. Silvestre & E. Zimmermann (Dir), Pratique de la psychothérapie EMDR (pp. 269-278). Paris: Dunod.
Delbrouck, M. (2021). Comment traiter le burn-out: Syndrome d'épuisement professionnel, stress chronique et traumatisme psychique. De Boeck Supérieur.
Grebot, É. (2019). Chapitre 3. Le burnout : du processus d’épuisement au syndrome d’épuisement professionnel. Dans : , É. Grebot, Les pathologies au travail: Stress, burnout, workaholisme et harcèlement. Approche intégrative (pp. 111-182). Paris: Dunod.
19/05/2024
La République démocratique du Congo, est très tristement célèbre pour les violences infligées aux femmes, le viol étant utilisé comme arme de guerre. Si la prise en charge médicale nécessite des soins somatique, l'art thérapie apporte également des bienfaits sur le chemin de la résilience pour ces femmes (Femmes violées en RDC: reconstruire les corps et les esprits grâce à l’art-thérapie. Emission de France Culture). Depuis plus de vingt ans, à l'hôpital de Panzi, le docteur Denis Mukwege, chirurgien gynécologue, travaille à la reconstruction chirurgicale des femmes victimes de violences sexuelles. Ces femmes bénéficient également d’un suivi psychologique, socio-économique et judiciaire.
Cynthia Fleury, à la tête de la chaire "humanités et santé", soutient la prise en charge par l’art-thérapie. La danse dans la prise en charge du stress post traumatique permet de sortir progressivement de l'état de sidération. Par le mouvement au travers de danses libres, là où les mots n'étaient pas possibles dans un premier temps, la parole se libère progressivement et les demandes de rapprochement et d'échange se font jour. Il a également été observé un attachement qui se recrée entre les femmes et dans la relation mère-enfant. La danse, plus que tout art, apparaît comme facilitatrice de recréation de lien. Dans le stress post-traumatique, il y a rupture de lien, phénomène de dissociation et rupture relationnelle. La danse, médiateur artistique, permet la reconnexion à soi et des différentes parties (corps, émotions, pensées), la reconnexion aux autres par le partage et ouvre à nouveau le sens de la vie. Le mouvement collectif soutenu par la musique et le thérapeute est thérapeutique.
La danse fait partie des invariants que l’on retrouve dans toutes les cultures du monde, aux côtés de la musique. Les recherches anthropologiques et archéologiques en attestent, avec des découvertes remontant à -40000ans (Garfinkel, 2020). Elle aurait permis d’établir un lien avec la nature et les événements inexplicables, dans une forme de communication par le corps. Ces pratiques semblaient incluses dans le fonctionnement social et ordonnaient, organisaient et régulaient le groupe à travers des rituels collectifs chantés, costumés, dansés. L’histoire en atteste plus près de nous (danse des Corybantes en Grèce, Nataraja dans le boudhisme, danses de Saint-Guy au moyen âge, ...) avec des danses ritualisées à vertu thérapeutique (Schott-Billemann, 2020).
Les pratiques se poursuivent donc aujourd’hui et offre une voie de guérison et d’épanouissement dans les domaines physique, social, émotionnel, mental et spirituel. A Panzi, des femmes en témoignent, retrouvant la voie de la guérison et se réinvestissant dans des projets de vie.
Bibliographie/Sitographie
Garfinkel Y. (2020). Danse sacrée, Danse profane, de la Préhistoire au Moyen-Âge. In Nouvelle histoire de la danse en Occident, De la préhistoire à nos jours. Sous la direction de Laura Cappelle. Éditions du Seuil
Schott-Billmann, F. (2020). Chapitre VIII. Les danses de guérison d’hier et d’aujourd’hui. Dans : F. Schott-Billmann, Thérapie par la danse rythmée: Les bienfaits de la transe (pp. 139-152). Paris: Odile Jacob.
26/11/2023
La Psychophysiologie étudie la relation Corps-Esprit. Le système nerveux, unité fonctionnelle composé du système nerveux central (SNC) et du système nerveux autonome (SNA) est à la base de processus physiologiques et psychologiques. Laissons de côté le système nerveux central et intéressons-nous au système nerveux autonome. En charge de l'homéostasie, il régule l'équilibre interne de manière non volontaire, nous permettant ainsi de nous ajuster à notre environnement.
Nous avons d'une part le système sympathique (SS) ou orthosympathique. Il permet de répondre de manière instinctuelle par la fuite ou le combat, lorsqu'un danger se présente à nous et, de nous adapter à la situation. La peur prédomine à ce moment là. D'autre part, le système parasympathique est composé de deux branches. La branche dorsale (SPD) est activée lorsque les défenses sont dépassées dans une situation de danger intense, présentant une menace vitale. Elle déclenche la réponse de figement, diminuant les fonctions vitales au minimum, dans un instinct de conservation. Il s'agit de "faire le mort". Le système parasympathique ventral (SPV) active, quant à lui, la détente, l'engagement social et la communication, lorsque les conditions de l'environnement deviennent stable et apportent de la sécurité. On observe alors une ouverture du corps avec des sourires, des vocalisations, et une relations aux autres accrues.
Dans le continuum des évènements de la vie, nous passons d'un système à un autre. Dans des conditions sans danger, le système sympathique a un tonus bas. Nous sommes en sécurité, détendus et engagés avec notre environnement, dans l'apaisement et la joie. Si la nouveauté se présente, le tonus du système parasympathique ventral diminue et le système sympathique s'active. Ce sont l'alerte et la peur qui prédominent. Dans un premier temps il y a une évaluation du danger pour déterminer le type de réponse fuite ou combat, puis une réponse motrice jusqu'au moment où le danger disparaît. Nous agissons pour réguler notre interaction avec l'environnement. Si le danger est très intense, il mobilise le système sympathique, qui ne peut sortir du danger. La branche dorsale du système parasympathique s'active alors et amène la réponse de figement. Le degré de dangerosité est évalué comme ingérable pour fuir ou attaquer et c'est l'effroi qui s'empare de nous. Les branches sympathique et parasympathique dorsale fonctionnent en même temps ce qui provoque le figement, appelé aussi dissociation avec une anesthésie physique et psychologique permettant de supporter momentanément l'insupportable. Nous ne pouvons agir face au danger.
Ce mécanisme utile est fonctionnel s'il est limité dans le temps. Une fois le danger passé, le frein parasympathique dorsal est levé et la réponse motrice de fuite ou de combat donne une réponse indifférenciée, c'est-à-dire non orientée vers un danger présent dans l'ici et maintenant. La personne semble attaquer dans le vide libérant ainsi l'énergie accumulée avant le figement. Parfois cette énergie accumulée ne peut de libérer et se retourne vers l'organisme donnant ainsi des manifestations somatiques.
L'étude de ces phénomènes a donné lieu à la "théorie polyvagale" élaborée par Stephen Porges. Elle ouvre la voie de la résolution des traumas. Ceux-ci se manifestent de différentes manières selon le type d'événement vécu, l'âge de la personne au moment de l'événement et la chronicité ou non.
Le tableau ci-dessous donne un aperçu:
Traumas précoces ou sévères Traumas +tardifs ou -sévères
Emprise du SPD Domination du SS
Figement Agitation vaine, explosive
Ralentissement cardiaque, syncope, … Anxiété, attaque de panique, irritabilité,
Pas d’autres possibilités du bébé impulsions difficilement contrôlables
Evitement du contact social
Dissociation
Somatisation
Pb digestifs, asthme, migraines, fatigue chronique,
Fibromyalgie
Lors des accompagnements thérapeutiques, les tableaux ne sont pas aussi nets. Des symptômes des deux types apparaissent en fonction de la sévérité du stress et de l'histoire de la personne. Si l'on prend comme exemple l'alimentation et l'influence du SNA, nous pouvons observer des symptômes liés à une augmentation de l'alimentation (hyperphagie, boulimie) sous influence du système sympathique et à contrario, un arrêt de l'alimentation (anorexie), lié au système parasympathique dorsal. Ce sont des pistes intéressantes à explorer.
Prendre en compte les ressources de la personne, quelles soient internes ou externes et ses capacités d'autorégulation permet d'avancer pas à pas. Mettre la focale sur l'importance des soutiens de l’environnement redonne de la sécurité. Développer une alliance thérapeutique de confiance réactive peu à peu le sentiment de sécurité en activant le système parasympathique ventral. Un travail thérapeutique d'orfèvre, par petites touches ouvre la restauration du lien, la confiance et l'ouverture aux autres
Bibliographie
Schittecatte, M. (2014). Chapitre 18. APPORT DE « LA THÉORIE POLYVAGALE DES ÉMOTIONS » DE S. W. PORGES À LA PSYCHOTHÉRAPIE DES ÉTATS DISSOCIATIFS. Dans : Michelle Vinot-Coubetergues éd., Les fondements des psychothérapies: De Socrate aux neurosciences (pp. 299-313). Paris: Dunod
20/04/2023
L'art, si l'on prend une position plus globale par rapport à la danse, est un moyen de symbolisation du monde, de mettre à l'extérieur notre monde intérieur etun de transmettre un message. Il a un impact à la fois dans nos capacités réceptives et nos perceptions. Il est le vecteur de ce qui s'échange entre l'environnement et notre vie interne. Les effets de l'art sur notre bien-être a été étudié et les bénéfices sont réels.
De l'art est né l'art-thérapie, sous plusieurs formes. La musique, l'écriture, le théâtre et la danse notamment ont été utilisées pour l'expression de la vie intérieure et le traitement de troubles psychiques. La danse est une forme d'art où le médiateur n'est pas extérieur à celui qui exerce la pratique artistique. Marian Chase a dans les années 30-40 initié le développement de la danse thérapie. Depuis différents courants ont essaimé, poussant un peu plus loin la réflexion sur les bénéfices de la danse en tant que thérapie. On pourra se référer aux travaux d'Anna Halprin, de France Schott Billemann notamment.
La danse engage le mouvement corporel, la relation à soi et à l'autre, et favorise ainsi les émergences émotionnelles et ainsi la réflexion sur ce qui est vécu. Plusieurs études ont montré ces effets sur la diminution de la détresse psychologique, l'amélioration des affects positifs et de la confiance en soi, la réappropriation corporelle et l'ouverture sur de nouvelles possibilités. la danse contribue au bien-être général, développe les compétences sociales, l'empathie kinesthésique (ressenti du mouvement de l’autre), identification et l'expression des émotions
Dans le cas des danses dyadiques, nous nous approchons de ce qui se passe au contact de l'autre d'une manière plus fine. La danse comme lieu de contact permet d'éprouver l'expression du contact social et de la corporalité, de prendre conscience des phénomènes émergents (ressentis corporels, émotions, mouvements, pensées). Elle est également un lieu de connexion corporelle, visuelle et émotionnelle. Par le contact corporel, le regard, la possibilité de conscientiser et réguler les émotions est accrue, par empathie kinesthésique et par partage émotionnel.
L'expérimentation des frontières psychocorporelles a un impact positif sur le sentiment de vide prolongé, avec une réduction du stress, de l'anxiété et des insomnies, notamment. Pour en savoir plus, je vous recommande la conférence de Stéphanie Moret qui a mené une étude sur les pratiques artistiques, la danse et la santé mentale.
https://www.youtube.com/watch?v=RUl7PprOVRY
21/03/2023
La thérapie par le corps et plus spécifiquement le mouvement dansé, permet d'accéder aux dimensions du sensible, au non-verbal, aux émotions. Les sensations corporelles, parfois clivées et enfouies, émergent au cours des différentes propositions et activent la connexions aux émotions. Le champ créatif s'ouvre alors, ainsi que le processus de restauration, de réappropriation de son corps, de son histoire, de son être.
La pratique groupal sécurise et amplifie le processus et offre l'opportunité d'un travail relationnel et de co-création.
Gaëlle Delahaie
06.64.76.18.81